décembre 26

Comment réagir quand mon enfant refuse ?

Temps de lecture : 7 minutes

Pour ce Café Papote N°2, j’ai reçu la question d’une maman qui fait face à des échecs de ses tentatives de coopération : son enfant de 2 ans refuse catégoriquement de faire ce qu’elle lui demande.

Voici sa question :

Contexte : Mon enfant refuse catégoriquement

« Que faire lorsque le but n’est pas atteint et que la coopération ne se fait pas, car l’enfant émet un refus catégorique ? »

C’est souvent dans ces situations qu’elle se sent désemparée.

  • « Doit-on laisser tomber?
  • Mais cela n’est pas toujours possible et quel résultat dans la tête de l’enfant ?
  • Crier, menacer, non merci et pas de résultats probants
  • Doit-on le forcer à s’habiller, car c’est comme ça, il faut partir et on n’a plus le temps de négocier?
  • Et tant pis pour la crise qui surviendra, on désamorce après en discutant.
  • Les punitions n’étant pas la solution, et la responsabilisation pas toujours accessible et audible pour un enfant de 2 ans… »

« Le matin, ma fille (2 ans) met beaucoup de temps à s’habiller, c’est tous les matins un vrai jeu de funambule pour qu’elle accepte et parfois c’est un non catégorique. Une fois qu’elle est habillée, elle accepte de mettre son manteau et ses chaussures sans problème. »

La maman m’explique qu’elle a essayé plusieurs astuces :

  • Le jeu en faisant parler ses orteils et autres parties du corps et en mimant /jouant au théâtre la scène 🙂 « oh le petit ventre il a froid il faudrait mettre le t shirt pour le réchauffer!! glaglagla »,
  • De s’habiller en même temps qu’elle en lui demandant ce qu’elle devait faire pour qu’elle lui montre,
  • De lui faire choisir ses vêtements parmi 2 présélections,
  • D’inverser l’ordre des préparatifs (habillage puis petit déjeuner, mais c’est pire),
  • De lui expliquer qu’il faut s’habiller pour sortir, car on ne peut pas aller chez nounou en pyjama sinon elle ne pourra pas sortir jouer, car tombera surement malade,
  • De la prendre de force et l’habiller en lui disant que c’est comme ça, et donc là c’est la crise et tout ce qui s’ensuit. Et surtout de la culpabilité pour la maman et une grosse fatigue et colère pour sa fille.
  • De la responsabiliser en lui disant que si elle prend trop de temps pour s’habiller alors elle ne pourra pas aller câliner les lapins avant de partir, car elles n’auront plus le temps,
  • De lui dire que son besoin d’être à l’heure chez nounou pour ensuite aller travailler et la retrouver ce soir..Etc.

Les épisodes 15 et 16 concernant l’autonomie de l’enfant ont déjà donné plusieurs pistes à la maman en réduisant drastiquement les jours de refus catégoriques en l’espace de 10 jours de mise en pratique.

Mais pour autant, quand elle y fait face, le temps nécessaire pour faire avancer sa fille le matin reste difficilement vivable : environ 40 minutes juste pour l’habillage, pouvant aller à 1H15 les jours où elle n’est vraiment pas coopérante.

Ma Proposition face au refus catégorique d’un enfant

Effectivement, comme je l’ai partagé dans ces épisodes, donner de l’autonomie à ton enfant permettra de réduire significativement les phases d’affirmation et de potentielles oppositions de ton enfant, car son besoin d’autonomie.

Cependant, comme j’aime le rappeler, il n’y a aucune solution qui marche à 100%.

En tout cas, ce n’est pas ce que je te promets, car je trouve cela malhonnête, car impossible.

En face de toi, c’est un enfant, un être humain. Et donc par définition complètement imprévisible… Tout comme toi !

Analyse du contexte « mon enfant refuse catégoriquement »

Personnellement, lorsque je fais face à un refus catégorique de mon enfant, j’analyse dans un premier temps la situation.

logigramme en cas de refus de l'enfant : se demander si c'est vital ou non

Il y a alors 2 cas de figure, selon moi :

  • Soit il s’agit d’une situation de sécurité vitale : le danger est réel, mesurable et vital.

Dans ces cas-là, il n’y a absolument aucune négociation possible.

Ma limite étant la sécurité de mon enfant.

  • 2ème cas de figure : le refus de mon enfant n’est pas lié à un besoin vital

C’est le cas de figure, selon moi, de l’exemple de la maman qui me pose la question.

Dans ces cas-là, je t’invite à creuser la question de ton pourquoi, de ton besoin.

Je vais te donner un exemple concret des 2 situations.

Refus catégorique de ton enfant dans un contexte de sécurité

Pour te donner des exemples, cela peut concerner la prise d’un médicament, le nettoyage de nez (à ce sujet je te partage une vidéo montrant comment nettoyer efficacement le nez des tout-petits, sans les noyer. Ça a révolutionné les soins chez moi… Et je me l’applique personnellement quand la sinusite me tient !) ou bien un passage piéton, marcher sur un parking, s’attacher en voiture.

Dans ces cas précis, je fais donc face aux émotions de mon enfant (souvent la colère!) et j’explique le pourquoi de la règle.

Je l’explique de telle sorte de tenter de faire résonner mes raisons au moteur de la motivation interne de mon enfant.

Prenons l’exemple du cas du refus de la prise de médicament.

Avec Crapopoulos, c’était vraiment sport, nous en étions arrivés à la solution extrême du gavage par seringue dans la bouche, à l’aide d’un tuyau dirigé sur le côté de la bouche, pour éviter qu’il ne ressorte tout d’un mouvement de langue.

Pour certain.es c’est une VEO par le non-respect du corps de l’enfant. Personnellement, si je n’en suis pas heureuse d’en arriver là, c’est pour moi une nécessité, car il s’agit de la santé de mon enfant, où un diagnostic a été posé par un médecin : Il faut la prise d’un médicament pour aider le corps de mon enfant à guérir.

Je lui expliquais alors que je comprenais, qu’il n’aimait pas le goût de son médicament. Mais que c’est grâce à cela qu’il n’aurait plus mal aux oreilles bientôt. Je m’excusais de devoir le contenir et de le forcer ainsi, mais que ma priorité était qu’il aille mieux. Et que ce serait grâce au médicament.

Le mot d’ordre est d’accueillir, mettre en mot ce que ressent ton enfant pour lui faire sentir que tu le comprends, tu compatis. Et tu expliques ce qui motive ta décision.

Fuis les réponses du style “c’est comme ça”, “il le faut”, “c’est obligatoire”.

les phrases à ne plus utiliser car n'expliquent pas le pourquoi de la règle

Car finalement il n’y aucune raison donnée, aucune explication, à part la fatalité, une force inconnue supérieure…

La puissance d’un pourquoi est sous-estimée.

Cela peut te demander d’affiner ton raisonnement, la raison qui te pousse à agir ainsi avec ton enfant. Mais si tu trouves le cœur du pourquoi, il sera plus facile pour ton enfant d’y adhérer. Même si c’est à retardement !

Parce que, soyons honnêtes, sur le coup ton enfant ne te le montrera surement pas ! Mais c’est une graine plantée pour le futur…

Un autre exemple, concernant  le refus de la ceinture de sécurité et du port du manteau dans le siège auto :

J’ai montré à mes enfants des vidéos de crash tests, fait avec des mannequins, où le petit mannequin portait ou non sa ceinture, portait ou non son manteau dans le siège auto. Ils ont compris par eux-mêmes que pour leur sécurité, il était nécessaire de s’attacher dans son siège auto, en retirant son manteau (et en le mettant par-dessus, en couverture, si besoin). Les images n’ont rien d’effrayant. Mais ainsi ils se sont fait leur propre opinion, c’est leur motivation interne qui est enclenchée. Je n’ai plus jamais eu besoin de me fâcher pour cette condition de sécurité ! Voici des liens si tu veux creuser le sujet

Refus catégorique de ton enfant dans un contexte non vital

Comme je l’ai rapidement mentionné, je t’invite dans ces situations (qui sont les cas les plus fréquents, de ce que je constate) à creuser le pourquoi tu as établi cette règle avec ton enfant.

  • Est-ce par convention sociale ? Parce que tout le monde fait ainsi ?
  • Est-ce par reproduction de ce que tu as connu ?

Finalement, à la racine de cela, il y a très souvent des croyances.

Personnelles ou héritées, mais ce sont des raisons profondément ancrées en nous et qui sont difficiles à déconstruire tant que nous n’avons pas pris conscience de leurs existences !

Dans le cas décrit par la maman qui m’a posé la question, le problème, tourne autour de l’habillage du matin. Pas du manteau ni des chaussures. Mais de passer du pyjama aux habits en journée.

Personnellement, dans mon cadre éducatif, je classe cette situation dans un contexte non vital. Même si j’entends le fait que ton enfant puisse tomber malade, car prendre froid s’il reste en pyjama. Cela n’est pas, dans mon cadre (je le répète) quelque chose de vital. Au pire, dans l’éventualité où effectivement mon enfant tombe malade (ce qui n’est pas une certitude) cela serait une conséquence. J’expliquerais alors, si cela se produisait, à mon enfant le lien de cause à effet, pour lui permettre d’activer sa motivation interne et comprendre l’intérêt de s’habiller en fonction de la météo…

Dans ce cas précis, donc, je chercherai à savoir pourquoi mon enfant refuse de s’habiller.

Il peut y avoir plusieurs causes que l’on ne soupçonne pas en tant qu’adulte :

Ton enfant peut refuser pour une question de confort :

Il faut reconnaître qu’un pyjama c’est nettement plus douillet qu’une tenue de jour. Sans parler des vêtements si jolis, mais franchement pas confortables. Je pense aux jeans slims, aux collants où le pied peut se trouver emprisonné si la taille commence à être petite, aux robes qui peuvent entraver les mouvements (trop serrés ou trop amples qui cachent la vision du corps, etc.)

habits pas confortables empechent enfants de jouer
Illustration de Fanny Vella
Mon expérience

J’ai connu cela avec Chocapic qui refusait de mettre ses pantalons. Il ne voulait vivre qu’en pyjama ou en jogging! Jusqu’à ce que je comprenne qu’en réalité il cherchait le confort et le contact doux : l’intérieur molletonné contrairement à la toile rêche d’un jean. Les boutons et autres agrafes contre une taille élastique qui monte et descend sans effort… Le compromis trouvé a donc été de lui prendre des Jogpants : des pantalons à la taille élastique : plus de boutons. Et des coupes droites : Adieu le slim qui colle et qui entrave.

Autre compromis : Il a le droit de mettre ses joggings les jours de sport à l’école et le WE lorsque nous ne sortons pas.

Par contre, je n’ai pas encore trouvé de compromis pour les chemises ! Cela fait au moins 3 ans qu’il n’en a pas porté, il déteste les boutons et le look d’une chemise… Quelques fois, l’été j’arrive à lui faire troquer ses tee-shirts contre un polo… Mais c’est assez rare !

Ce que je souhaite te partager avec cet exemple, c’est de creuser la question du pourquoi ton enfant refuse de mettre ses habits

  • Est-ce parce que son pyjama est plus confortable ?
  • Plus pratique ?

Si c’est cela, peut-être voir ce que ton enfant aime dans un vêtement. Définir avec lui son “cahier des charges” d’un vêtement idéal :

  • intérieur doux ?
  • Liberté de mouvement ?
  • Fermeture facile ?

Une autre raison du refus de ton enfant peut être le rebut de la transition

Être en pyjama ou habillé est un état qui permet de vaquer à ses occupations, de jouer, de lire, de faire ce que l’on souhaite.

Se changer, c’est une action de transition où l’on fait une action : Celle de se changer. On ne peut donc pas faire autre chose, ce qui a le plus d’attrait pour ton enfant : jouer, lire, explorer, etc.

C’est donc une activité qui n’a aucun attrait pour ton enfant.

Ce qui l’intéresse, c’est de jouer, faire ce qu’il a décidé. Pas de faire ce qui est “obligé”…

Je te propose donc de creuser le “pourquoi” ton enfant refuse de s’habiller, pour comprendre son moteur interne, la raison qui le pousse à refuser.

C’est cette compréhension qui te permettra ensuite de t’adapter, et de proposer une solution…

Mon expérience

Pour te partager mon expérience : Ma fille voit la salle de bain comme une contrainte. C’est un temps de “perdu” comme elle me le dit maintenant. Mais à 2 ans elle ne savait naturellement pas mettre les mots ainsi. Mais son sentiment en tout cas, lui perdure !

Notre compromis est, selon les jours, de le faire le plus vite possible : je ne la contrains plus de se laver le matin. C’est une étape que j’ai supprimée de sa routine pour ne plus la rebuter aussi fortement. Elle se lave le soir, avant de se mettre en pyjama. Et ça me convient.

À 2 ans, j’avais également adopté la possibilité de l’habiller dans la pièce de son choix. Elle lisait un livre en se contorsionnant pendant que je l’habillais. Ce n’était pas le plus pratique pour moi, soyons honnêtes.

Mais entre une crise de 40 minutes et un peu de contorsion le temps qu’elle grandisse et que l’on puisse discuter de ce que l’on peut mettre en place pour satisfaire tout le monde, j’ai choisi ma bataille comme on dit !

En résumé, face au refus catégorique de ton enfant

Je ne te dis pas de faire ainsi. Je te donne des pistes, des axes de réflexion.

Car finalement, que ta fille parte en pyjama chez sa nourrice… Qui est-ce que cela impacte le plus ? Ton enfant ? Ou toi ?

  • N’est-ce pas toi qui aurais l’impression de ne pas être un bon parent ?
  • Peut-être la peur de céder à ton enfant et d’être laxiste ?
  • Ou bien du jugement qu’un tiers pourrait porter sur toi, ton enfant et ton choix d’éducation ?

C’est ce dont je parlais en mentionnant les croyances héritées ou personnelles, les conventions sociales…

Je ne te dis pas qu’il faut laisser ta fille partir en pyjama. Mais de chercher à comprendre pourquoi elle ne veut pas s’habiller.

Et comme ton enfant est encore petit pour vraiment exprimer sa pensée (2 ans), c’est peut-être à toi de lui faire des suggestions, des compromis : des habits adaptés à son goût ? des journées définies où l’on peut rester plus longtemps en pyjama (je suis de celles qui aiment trainasser en pyjama quelques fois… Ce qui n’est clairement pas du goût de mon mari qui saute limite dans ses vêtements dès qu’il pose un orteil sur le sol !).

Comme ce que j’ai proposé à mon fils : jogging oui, mais uniquement si l’on reste à la maison…

Pour conclure, ma proposition quand tu fais face au refus catégorique de ton enfant, c’est d’évaluer la situation : contexte vital ou non. Et en fonction, définir le cadre clair ou bien chercher la compréhension du pourquoi ton enfant refuse. Mais dans tous les cas, prendre le temps d’expliquer TES raisons, pour solliciter le moteur de la motivation interne de ton enfant…

logigramme en cas de refus de l'enfant : toujours expliquer le pourquoi de la règle

Pour aller plus loin sur la question je te recommande les épisodes 19 “Ce n’est pas lui qui décide” et 21 “Mon enfant ne m’écoute pas”

Si tu désires toi aussi me poser ta question, pour que j’y réponde lors d’un prochain épisode « Café Papote », tu peux te rendre sur ce lien afin de m’y laisser ta question de manière anonyme !

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